Il est rare qu’un avocat pénaliste se réjouisse d’une condamnation.
Si l’acte de condamner est à la fois nécessaire et légitime dans une société organisée, il ne peut en effet jamais être source de jubilation, surtout pour celui qui a pour mission de défendre ses semblables.
Et pourtant, une fois n’est pas coutume, nous nous réjouissons aujourd’hui d’une condamnation !
Nous jubilons même !
Et avec nous tous les avocats pénalistes !
La condamnation qui nous réjouit a été prononcée le 18 mars dernier par une juridiction collégiale originale, composée par la Présidente du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE, le procureur de la République de cette juridiction et la bâtonnière de l’Ordre des Avocats de la cité Phocéenne.
Tous trois, dans un communiqué écrit d’une seule plume, ont choisi de condamner « les propos excessifs » tenus à l’audience de comparution immédiate présidée par Madame Delphine BELMONTET le 20 février 2017 et diffusés sur France Culture.
Des propos scandaleux (voir notre billet du 16 mars : « Indignité à Marseille ») dont les trois autorités marseillaises proclament solennellement qu’ils « ne sont pas acceptables » et qu’ils « ne reflètent pas le travail mené au quotidien, tant par les magistrats que par les avocats du tribunal de grande instance de Marseille ».
Démarche rare. Condamnation exceptionnelle.
Que Madame Isabelle GORCE, Monsieur Xavier TARABEUX et Madame MAILLET, respectivement représentants des juges, des procureurs et des avocats marseillais, réunis le temps d’un précieux communiqué pour affirmer « Leur souci commun, de voir une justice digne et humaine être rendue », en soient chaleureureusement remerciés.
Les deux premiers rendent ainsi à l’institution judiciaire l’honneur et la dignité dont l’avaient scandaleusement privée les magistrats enregistrés par les micros de France Culture. La troisième rappelle la fonction inamovible des avocats dans la défense d’une justice digne, humaine, loyale. En un mot d’une justice républicaine.
Puissent tous les magistrats de France méditer ce communiqué commun et se rappeler qu’il n’est pas de justice sans équilibre entre les valeurs et les forces qui s’affrontent au sein du prétoire. ET donc sans respect de l’autre, y compris le prévenu, par-delà les faits qui lui sont reprochés.
Puissent également tous les avocats, et notamment les avocats pénalistes, méditer la leçon de ce triste épisode, en se rappelant que la défense ne doit jamais abdiquer, en tolérant que le juge renonce à sa dignité.
Défendre une femme ou un homme devant un tribunal, c’est aussi défendre la Justice.
Y compris contre les juges.